Avec Song Kang-ho, Kim Sang-kyung, Kim Roi-ha, Song Jae-ho, Byun Hee-bong, Go Seo-hui, Ryu Tae-ho
Décor : Ryu Seong-hui
Montage : Kim Sun-min
Musique : Taro Iwashiro
Scénariste : Bong Joon-ho, Shim Sung-bo
Son : Choi Tea-young
Technique : Prise de vue réelle
Images : Kim Hyung-koo
Source : The Jockers Films
Evénement : Travelling 2016, Travelling 2016
1986, province de Gyunggi. Deux inspecteurs de police aux méthodes radicalement opposées doivent unir leurs forces afin de piéger un tueur en série qui sévit dans la région. Les soupçons se déplacent d’un suspect à un autre alors que les meurtres barbares continuent et que l’enquête s’enlise… Bong Joon-ho revisite ingénieusement le polar en faisant cohabiter l’effroyable et le burlesque. Région de Gyeonggi-do
Critique : Memories of Murder s'inspire d'un fait divers réel, une série de meurtres commis entre 1985 et 1991 aux derniers temps d'un régime militaire autoritaire. La Corée du Sud vivait au rythme de la contestation étudiante et ouvrière et de sa répression permanente. La brutalité était une pratique policière habituelle. Cette situation historique est ici présente en filigrane, sans ostentation, sans volonté démonstratrice. Elle se déduit du type de relations qui s'établissent entre les personnages et de leur comportement. Sans doute parce que les exigences du genre ne sont jamais méprisées, même si elles font l'objet d'un subtil dépassement et que les déterminations socio-historiques attendues sont plus complexes que prévu.L'arrivée du policier de Séoul et sa prise en charge des événements vont insensiblement transformer la donne. A la fureur bornée des pandores locaux vont dès lors s'opposer une action plus rationnelle, un mode de déduction plus scientifique, une approche apparemment plus humaniste et plus respectueuse des individus. Au fil des pistes infructueuses et des suspects, on aura eu le loisir de découvrir une communauté, comme un échantillon de la Corée rurale, ses paysans, ses commerçants, ses naïves lycéennes, ses flics patauds, soit une suite de caractères à la fois essentiels pour la conduite du récit policier et en même temps jamais véritablement instrumentalisés par celui-ci, restitués dans toute leur épaisseur humaine. Le cinéaste réussit même un véritable tour de force, celui d'humaniser, jusqu'à les rendre touchants, le tandem de policiers locaux, instinctifs et bornés.Il serait certes aisé de comprendre l'irruption du flic de la ville comme la métaphore d'une transition insensible de la Corée elle-même vers un idéal démocratique, une raison qui rendrait caduque une violence primitive et improductive. L'optimisme apparent d'une telle évolution est ici complexifié par l'évolution des événements, par la manière dont le spectateur, évidemment attaché à la résolution de l'énigme policière, se voit mené de désillusion en désillusion, enfin par la contamination du bon" flic que l'impuissance fait soudain basculer dans la violence. C'est que, à bien y regarder, la brutalité des policiers est guidée par la recherche du rendement. La tendance primaire et brutale qu'exprime leur violence est peut-être aussi celle dont se nourrit un modèle économique libéral triomphant. Comme si l'évolution historique ne pouvait s'accomplir que dans la fusion d'un archaïsme qui résisterait (une pulsion primitive d'accumulation) et d'un nouveau qui surgirait (la raison démocratique)."Jean-François RaugerEn savoir plus sur http://www.lemonde.fr/archives/article/2004/06/22/memories-of-murder-meurtres-sans-coupable-dans-la-verte-coree_370016_1819218.html#dsLm5YQJwW7vVjJ0.99