Mademoiselle Julie

Avec Anita Björk, Ulf Palme, Märta Dorff, Lissi Alandh

En l’absence de son père le Comte, Mademoiselle Julie passe le soir de la Saint-Jean à faire une petite fête en compagnie de ses valets Kristine et Jean. Prise de désir par ce dernier, elle se donne à lui durant la nuit. Mais à l’aube, Mademoiselle Julie est prise de profonds remords qui deviendront tragiques... Lauréat de la Palme d'or, ce film se joue des codes du cinéma suédois en conservant le caractère irrévérencieux de la très célèbre pièce d'August Strindberg.

Critique : Alf Sjöberg, figure majeure du théâtre et du cinéma suédois, marqua les esprits avec son adaptation cinématographique de Mademoiselle Julie, tirée de la pièce de théâtre d'August Strindberg écrite en 1888. Ce huis clos tragique et naturaliste, confiné dans la cuisine d’un manoir, explore les tensions intimes et sociales qui opposent Julie, jeune aristocrate en quête de liberté, et Jean, valet de ferme tiraillé entre ses ambitions et son
statut.

Avant de transposer Mademoiselle Julie au cinéma, Sjöberg avait déjà mis en scène la pièce sur les planches en 1949. Un « homme de théâtre » avant tout, il y trouve un terrain
fertile pour exprimer ses thèmes de prédilection : la lutte des classes, la quête de liberté, et les obligations imposées par la société. Au-delà d’une simple adaptation, Sjöberg enrichit l’oeuvre de Strindberg en exploitant les possibilités du cinéma : un montage innovant et des flashbacks viennent briser la linéarité du récit et approfondir la psychologie des personnages.

En 1951, cette audace est récompensée par une Palme d’or à Cannes, partagée avec Miracle à Milan. Si De Sica dresse un conte humaniste teinté de néoréalisme, Sjöberg offre une tragédie viscérale où le désir et les conventions sociales se heurtent violemment. À travers cette oeuvre, il montre comment le cinéma peut transcender les limites du théâtre, tout en restant fidèle à l’intensité dramatique du texte d’origine.

Remportant la palme d’or à Cannes aux côtés de Miracle à Milan de Vittorio De sica, Mademoiselle Julie illustre une société figée dans ses rapports de pouvoir, où la liberté apparaît comme un mirage. Julie et Jean, bien qu’animés par des rêves d’émancipation, restent prisonniers des hiérarchies sociales et des attentes imposées par leur époque. Une thématique universelle, portée par la mise en scène rigoureuse et avant-gardiste d’un réalisateur qui sut conjuguer l’héritage du théâtre à l’innovation cinématographique.