Les Vieilles légendes tchèques

Avec Zdenek Stepánek, Eduard Kohout...

Au fil de six contes traditionnels, dans les décors de la Bohême originelle, les héros accomplissent les exploits qui vont amener à la naissance de la nation, depuis le premier roi Cech. La force de Jiří Trnka est ici de donner vie et des émotions à des marionnettes aux traits de visages fixes dans une temporalité qui traverse les époques. La nature est féérique, les personnages héroïques, du grand art !

1953 : Lion d'or et prix spécial à la Mostra de Venise ; Prix de la Critique suisse au Festival international du film de Locarno

Précédé de Le Roman de la Contrebasse, Tchécoslovaquie, 1949, 13’, animation
Inspiré d’une nouvelle d’Anton Tchekov relatant la mésaventure d’une jeune baigneuse dépossédée de ses vêtements et contrainte de se réfugier dans l’étui d’une contrebasse, Trnka dévoile une fibre délicatement érotique.

Critique : Jiří Trnka adapte ici des sources littéraires qui mettent en valeur l’identité de la nation tchèque dans un élan épique où sont mis en scène six légendes. Les légendes en question sont plutôt modestes en apparitions fantastiques et c’est plutôt la poésie de l’ensemble des reconstitutions qui permet d’aller au-delà de la contrainte du réalisme soviétique imposé à tous les artistes de cette période aux pays sous régimes de l’URSS.

La force de Jiří Trnka est ici de donner vie et des émotions à des marionnettes dont les traits de visages sont fixes dans une temporalité qui traverse plusieurs époques et une grande quantité de personnages avec plus particulièrement l’évocation des Amazones qui pourraient représenter les revendications féministes de l’époque du cinéaste. Les épisodes ainsi narrés s’inspirent à la fois de sources littéraires et historiques tchèques précises tout en étant parcourus par le souffle de la tragédie shakespearienne et le sens critique de Cervantes de l’interprétation du sens de l’Histoire.

Le souffle épique convoqué ici par Jiří Trnka à travers ses marionnettes et le sens ingénieux de ses choix de mise en scène n’a rien à envier à celui d’Eisenstein dans ses propres évocations historiques. Cette nouvelle édition est largement documentée par un livret de près de 100 pages constitué d’une biographie du cinéaste et d’une analyse esthétique et stylistique précise du film ici en question. Une édition incontournable pour (re)découvrir Jiří Trnka et saisir toute la richesse des nuances sur lesquelles puise sa force de manière inépuisable encore de nos jours le cinéma d’animation. (Cédric Lépine / Mediapart)