Avec Mathieu Amalric, Michael Lonsdale, Jean-Pierre Kalfon
Décor : Antoine Platteau
Montage : Rose-Marie Lausson
Musique : Cyril Holtz
Scénariste : Elisabeth Perceval - D'après l'oeuvre de François Emmanuel
Son : Brigitte Taillandier
Technique : prise de vue réelle
Images : Josée Deshaies
Paris, de nos jours : Simon, 40 ans, travaille comme psychologue au département des ressources humaines de la SC Farb, complexe pétrochimique, filiale d'une multinationale allemande, où il est plus particulièrement chargé de la sélection du personnel.Un jour Karl Rose, le co-directeur de la SC Farb demande à Simon de faire une enquête confidentielle sur le directeur général Mathias Jüst, de dresser un rapport sur son état mental. Ne pouvant pas se soustraire à la requête de Rose et ne voulant pas risquer de se mettre mal avec Jüst, Simon accepte du bout des lèvres, en se promettant de conduire une enquête discrète et de rendre un rapport le plus neutre possible... mais très vite en pénétrant dans la nuit d'un homme, Simon entre dans la sienne : Une nuit hantée par les fantômes et les spectres de l'Europe contemporaine.
Critique : Le propos de Nicolas Klotz et Elisabeth Perceval, sa scénariste, n'est pas ici de tracer un parallélisme, par ailleurs discutable, entre monde de l'entreprise et nazisme mais bien d'instruire une réflexion sur la nature même du capitalisme contemporain, et de la permanence des mécanismes qui sous-tendent la société occidentale, au premier rang desquels une violence organisée et anonyme. Entreprise ambitieuse, dont ils s'acquittent de maîtresse façon, à travers un film foisonnant, aux strates multiples s'emboîtant en autant d'élargissements successifs de la perspective. Car s'il s'inscrit, dans un premier temps, dans la fort estimable tendance du cinéma démontant les mécanismes de l'aliénation en entreprise (à la façon, par exemple, de Violence des échanges en milieu tempéré), offrant une vision blême d'un univers peuplé d'individus construits sur un moule identique et des rapports de pouvoir s'y nouant, La question humaine gagne en densité à mesure que son enquête semble se refermer sur Simon, non sans ouvrir sa conscience. À l'instar de son propos, le film se fait alors proprement vertigineux, film noir dont la révélation, porteuse in fine de plus d'interrogations que de réponses, ne manque pas de désarçonner un temps. Sans qu'il soit fait aucunement mystère de son engagement, on est loin ici d'un manifeste démonstratif, mais bien en présence d'une œuvre à l'étrangeté stimulante – jusque dans sa mise en scène, à la judicieuse déclinaison. Une œuvre magistralement incarnée aussi par un Mathieu Amalric, offrant de Simon une interprétation habitée. Jean-François Pluijgers - CinergieBe Webzine n°122